Le paradoxe du
déroulement de notre processus évolutif est que même si c’est une
transformation qui impacte finalement l’ensemble de notre groupe humain, elle
ne peut être accomplie par la formation de groupes spécifiques au sein de notre
collectivité humaine. Une évolution authentique ne peut être initiée par
l’activité d’un groupe particulier mais par des individus se transformant
eux-mêmes; l’évolution est le résultat d’individus honorant leur authenticité
au-delà des activités et des marées de la mentalité collective.
L’un des
obstacles retardant l’évolution de notre développement actuel est que nous
avons une dépendance à la fabrication d’expériences non authentiques tout en
prétendant que nous essayons de devenir authentiques. Un exemple de ce
comportement est notre désir de former des groupes spécifiques comme moyen de
retrouver l’authenticité. Nous devenons ensuite dépendants de ces groupes, ce
qui en retour retarde notre développement évolutif en nourrissant et renforçant
la mentalité collective plus que l’authenticité individuelle. L’évolution
s’accomplit toujours à partir des « différences » et non des
« similarités ».
Les groupes de
soutien sont des dépendances déguisées qui nous séduisent et nous font vivre
dans le déni. Ils ne peuvent nous aider à grandir émotionnellement puisque ce
que nous attendons d’eux est de pouvoir garder notre équilibre. Les groupes
sont des sacro-saintes ouvertures vers la perpétuation de notre drame. Ils nous
donnent un sentiment d’exclusivité, celui d’être spécial et de posséder une
subtile supériorité. Ils nous poussent constamment à faire revivre les vieilles
histoires usées que nous nous racontons depuis des années. En nous offrant un
espace de partage soi-disant légitime pour raconter nos histoires aux autres,
ces groupes ne font qu’offrir un sentiment de réalité mensonger à ces illusions
fabriquées.
Un groupe de
soutien naît toujours de l’expérience d’une personne. Ce forum devient alors un
moyen par lequel l’expérience particulière de cet individu se transforme en un
ensemble de règles que tout le monde doit suivre.
Un groupe de
soutien naît également des « besoins et désirs » non-intégrés d’une
personne. Celle-ci reflète alors ces questions dans un forum composé de
personnes partageant ces mêmes dysfonctionnements émotionnels.
Dans cette
perspective, les groupes sont de ceux qui sèment potentiellement l’énergie
religieuse insidieuse qui devient inévitablement une drogue pour ceux qui ont
besoin et désirent suivre quelqu’un ou quelque chose. Ils sont un moyen
d’essayer d’orchestrer et d’organiser ‘le moment éternel’. Ils sont le plus
souvent une occasion pour les personnes qui manquent de courage pour s’exprimer
de s’écouter parler, de sentir que leurs opinions réactives ont un sens et de
justifier le fait de continuer d’être incapables de grandir émotionnellement.
Du fait que ces structures-mêmes court-circuitent les possibilités de développement
émotionnel individuel authentique, les groupes deviennent immanquablement des
bourbiers de critiques et soutiennent ainsi la faiblesse inhérente à la
mentalité victime/vainqueur.
Combien de
groupes de soutien possèdent un fonctionnement interne permettant de libérer
leurs membres du groupe afin qu’ils puissent apprendre à fonctionner de façon
libre et indépendante sans lui ?
Ceux qui se
laissent enfermer dans la dépendance à l’alcool et à la toxicomanie sont-ils un
jour libérés par leur groupe de soutien, ou le groupe ne devient-il pas à son
tour une dépendance camouflée qui retient ses membres paralysés et emprisonnés
dans la toile d’une organisation d’auto-préservation ?
Les groupes de
conscientisation du moment présent nous aident-ils à expérimenter notre
conscience du moment présent, ou mettent-ils tout simplement en évidence notre
frustration de ne pouvoir le faire ?
Ce n’est pas
parce qu’un groupe de soutien permet à ses membres de faire du surplace, de
vivre dans un ‘désespoir tranquille’, de trouver des compagnons de misère ou
d’échanger longuement sur des concepts spirituels, que cela signifie qu’il
accomplit quelque chose de tangible et donc de durable.
Si l’intention
d’un groupe de soutien n’est pas de libérer ses membres aussi rapidement et
efficacement que possible, il n’est qu’un outil de dépendance qui engendre
l’emprisonnement de la perception.
Ces groupes ne
peuvent nous assister dans notre croissance émotionnelle car toute croissance
émotionnelle abordée dans un contexte où il existe ‘un public’ est ‘une
représentation’. Et une représentation, peu importe combien elle est subtile ou
déguisée en expérience authentique est un simulacre. Les artistes-interprètes
jouent toujours un rôle. ‘La Présence’ ne peut être retrouvée par le biais de
faux-semblants tout comme la paix ne peut être ‘forcée’. Un spectacle est
toujours, de par sa nature, un comportement réactif – un comportement motivé et
orienté par les circonstances extérieures. Pour être authentique, la croissance
émotionnelle doit être réceptive, et un comportement véritablement réceptif
n’est fondamentalement possible que lorsque nous nous retrouvons totalement
seuls avec nous-mêmes.
Ce n’est que
lorsque nous sommes capables d’être constamment honnêtes envers nous-mêmes, pour
nous-mêmes et par nous-mêmes, que nous pouvons nous comporter en public de
manière authentique et cohérente.
Même lorsque
nous formons des groupes de soutien au nom de soi-disant ‘buts élevés’, comme
celui de discuter de l’unité ou d’autres nobles concepts intellectuels, nous
nous abusons encore nous-mêmes. Nous ne pouvons former un groupe exclusif pour
activer ce qui est en fait inclusif. Nous ne pouvons discuter de l’unité avec
une autre personne et espérer expérimenter véritablement l’Unité. Dès l’instant
où nous parlons de l’unité avec quelqu’un d’autre, nous entrons dans la
séparation ; notre perception de ‘l’autre’ nous ferme la porte à l’expérience
de l’unité.
L’unité
signifie « il n’y a pas d’autre ».
L’unité
signifie qu’il n’existe pas de groupe spécifique auquel appartenir ; que chacun
et tous font partie de notre groupe, de ce fait le concept de
« groupe » se dissout également. ‘Un groupe » n’est possible que
si nous sommes dans un état d’esprit de séparation car pour exister, ‘un
groupe’ a besoin ‘des autres’. Au cœur de l’unité, les ‘autres’ n’existent pas.
Le fait de
former ou de rejoindre un groupe dissous simultanément notre expérience de
perception de l’Unité.
Une autre chose
étrange que nous faisons ces jours-ci est de se réunir en groupes et de
s’asseoir en silence. Certaines personnes prennent l’avion pour traverser un
continent ou voyager vers au autre pays en payant d’énormes sommes d’argent
simplement pour aller s’asseoir dans le silence ! Il y a 15 ans un tel
comportement aurait été une idée juteuse pour un sketch absurde du Cirque
Volant des Monte Python. On peut facilement s’imaginer John Cleese en train de
déclamer :
« Entrez
tout le monde ! Voici l’Isoloir Où l’On Vient S’asseoir en Silence. Payez vos
cinq livres à l’entrée et venez vous asseoir dans le silence absolu pour le
reste de la semaine. Si ce n’est pas votre tasse de thé, vous pouvez bien sûr
aller de l’autre côté du couloir dans l’Isoloir Où l’On Se Frappe la Tête
Contre Son Genoux Droit Sans S’Arrêter, ce qui soit dit en passant est une
affaire aujourd’hui : seulement trois livres pour vous frapper jusqu’à vous
assommer. Non, Monsieur, s’il vous plaît, une fois que vous avez payé vos cinq
livres, silence absolu, merci. Madame, s’il vous plaît, veuillez-vous taire et
essayez d’apprécier la grandeur du service que nous vous offrons, sinon nous
vous rembourserons. Bien, maintenant je voudrais entendre le silence ! Mais
d’abord, j’ai quelques annonces à passer sur tous les bruits qui ne seront pas
tolérés. Bien… »
Ce n’est
pourtant pas une comédie, c’est ce que font les gens ! Nous fabriquons des
expériences spécifiques dans le but de nous asseoir ensemble en groupe dans le
silence et la tranquillité et nous payons même des gens pour qu’ils aient le
privilège d’organiser de telles occasions. Bien entendu une partie de
l’expérience repose sur la présence d’un individu que nous reconnaissons comme
étant spirituellement si évolué que s’asseoir tranquillement dans le silence en
sa compagnie vaut pour nous chaque centime dépensé. Pour faire l’expérience
gratuite et illimitée du silence, nous devenons dépendants d’une autre personne
ou d’un endroit idyllique éloigné de notre environnement quotidien ou encore
d’un autre groupe « d’autres ».
Jusqu’où nous
sommes-nous égarés du bon sens et de l’authenticité ? Comment ce comportement
est-il censé nous affermir d’une manière réelle et durable ? C’est ici la
conséquence d’avoir mélangé spiritualité et commerce ; il est évident que
certaines personnes gagnent énormément d’argent sur le dos de l’immaturité
émotionnelle, de la naïveté infantile et du mal-être intérieur de l’humanité.
La question à
se poser est celle-ci : Les résultats de telles pratiques de groupes sont-elles
réelles et durables ? La réponse est simple : si nous avons besoin d’y
retourner ou de réitérer l’expérience de façon répétitive, alors la réponse est
« Non ».
Dans de telles
conditions, quoique nous ayons expérimenté l’a été à partir d’une ‘fabrication’
où nous avons mis en spectacle notre prétendu calme et silence sur une scène
artificielle ; par conséquent cette expérience s’épuise et retourne
inévitablement au néant.
Les bénéfices
du calme et du silence ne peuvent être récoltés de façon réactive. Ils n’ont un
mérite réel et durable que lorsqu’on les a recueillis seul, loin des yeux du
monde et dans une liberté qui n’est possible que loin des échanges monétaires.
Ce que nous n’avons pas encore compris, c’est que lorsque nous devons payer une
somme particulière pour participer à de telles activités de groupe, il s’agit
de la valeur précise que notre inconscient leur accorde. Une ‘retraite
silencieuse’ accorde donc une valeur très limitée et quantifiable aux trésors
du calme et du silence et nous empêche donc d’expérimenter leurs bénéfices
illimités et sans prix. Dès l’instant où nous ressentons le besoin de nous
asseoir devant un autre être humain comme catalyseur d’une telle expérience,
tout ce que nous expérimentons devient inconsciemment associé à sa présence.
Ainsi, la question demeure: comment ceci est-il censé nous redonner notre
pouvoir ?
La réalité est
que lorsque nous sommes assis devant ‘un autre’, c’est ‘nous-mêmes’ que nous
ressentons, un reflet de la magnificence de notre propre Présence Intérieure –
un sentiment qui nous est disponible 24 heures par jour si nous prenons soin de
nous tourner vers l’intérieur pour l’expérimenter grâce à une discipline
cohérente. Tout ce que nous ressentons, c’est nous-mêmes. Il est vrai que nous
trouver en présence de ‘La Personne’ capable de refléter cet état rayonnant que
nous avons oublié peut nous être très bénéfique et avoir tout son sens.
Cependant, si une telle personne ne nous conduit pas simultanément à entrer en
nous-mêmes et ne nous prévient pas des dangers liés à rechercher de façon
addictive cette expérience à l’extérieur de nous-mêmes, une telle rencontre,
même profonde, nous déresponsabilise alors également.
Pour atteindre
cet état authentique de Présence rayonnante à l’intérieur de nous-mêmes de
façon réelle et durable, cela nécessite de commencer un travail intérieur
régulier et discipliné. Ce travail intérieur commence par grandir
émotionnellement.
La mentalité de
groupe ne peut nous aider à grandir émotionnellement car un groupe ne grandit
jamais.
Grandir
émotionnellement demande de pouvoir éveiller une force intérieure qui
neutralise les besoins et désirs individuels sur lesquels le groupe a besoin de
s’appuyer et qui neutralise également notre besoin que le groupe nous apporte
reconnaissance et soutien et nous indique la direction que nous devons prendre.
Grandir émotionnellement déstructure systématiquement le rôle d’un individu au
sein du groupe et s’il reste dans le groupe, cela peut se traduire par le
démantèlement de celui-ci. Grandir émotionnellement ne fait donc pas partie du
programme de groupe. Par autoprotection le groupe se retourne contre ou se
détourne systématiquement de toute personne qui grandit émotionnellement en son
sein, ou lorsque c’est impossible, l’enferme en lui offrant une promotion à un
échelon supérieur de sa hiérarchie interne.
Lorsqu’un
groupe promeut quelqu’un au statut de leadership, il vise l’ego de cette
personne avec l’intention de paralyser toute future croissance émotionnelle en
elle. Plus l’individu évolue le long de l’échelle de la hiérarchie de ce
groupe, le moins il lui est possible de s’ancrer et d’être authentique. Le
prestige du leadership n’est qu’un voile pour cacher la fourberie de
l’emprisonnement des perceptions qui s’en suit. Dans n’importe quel groupe,
plus on monte les échelons de la structure, plus la chute sera dure et
inévitable. Ce n’est qu’une question de temps avant que l’individualité en
apparence encouragée ne devienne accablée et anéantie par la mentalité de
groupe.
Bien sûr, tout
cela étant dit, il est tout de même recommandé de pratiquer « l’équilibre
et la clémence plutôt que le sacrifice », d’approcher la libération de la
mentalité de groupe avec responsabilité et douceur. Certains d’entre nous en
train de lire ceci font peut-être être actuellement partie de groupes de
soutien. Il ne s’agit donc pas ici de nous encourager à bondir et nous enfuir
de toute activité liée à ces groupes. Nous ne devons pas être dans la réaction
mais plutôt nous éveiller à notre situation en en prenant conscience. Gardons à
l’esprit qu’il s’agit ici de comprendre « la raison pour laquelle
l’approche du nettoyage émotionnel dans Le Processus de La Présence* ne
nous encourage pas à former un nouveau groupe ».
« Mon
Dieu, s’il te plaît épargne-nous un autre groupe ! »
Si nous sortons
actuellement d’une expérience de dépendance et que nous sommes en voie
« de rétablissement »- pour reprendre la terminologie des groupes de
soutien – nous sommes susceptibles de rester dépendants de notre expérience de
groupe. Afin de surmonter cette situation difficile et d’évoluer au-delà de cet
enfermement des perceptions, il est fondamental que nous ne blâmions pas le
groupe de notre situation car il s’agit ici de notre addiction à notre
expérience dans un groupe et non pas de la nature du groupe lui-même. Nous ne
pouvons reprocher à un groupe d’être un groupe, c’est sa nature intrinsèque. Il
n’est que ce qu’il est supposé être. Un groupe est comme un radeau de sauvetage
: il peut nous sauver de la houle et de la noyade, mais si nous ne le quittons
pas, nous ne pourrons revenir vers une expérience de vie authentique. Si nous
ne sommes pas prêts à explorer ce que signifie réellement ‘Vivre’, il est
conseillé de rester dans la structure du groupe afin qu’il puisse nous
accompagner avec son interprétation de ce représente ‘une vie saine’.
Lorsque nous
sommes prêts à expérimenter à nouveau une vie authentique, il ne tient qu’à
nous de nous demander si nous désirons vraiment découvrir, si nous sommes prêts
à sauter du radeau de sauvetage symbolisant le désespoir tranquille du
rétablissement et commencer à nager dans les eaux turbulentes du plan
émotionnel nous permettant de « développer » nos muscles. Lorsque
nous sommes en phase de rétablissement, que nous en soyons conscients ou non
nous recouvrons activement le point d’origine de notre mal-être soit en en
parlant de manière excessive, en blâmant les autres –ou le monde entier– ou en
accusant un éventuel ‘déséquilibre d’ordre chimique’.
Lorsque nous ne
sommes pas encore prêts à retourner embrasser la vie, il existe une liste
interminable d’excuses pour justifier le fait de rester paralysé dans un état
émotionnel anesthésié ou contrôlé.
Si vous êtes un
toxicomane en voie de rétablissement ou faites partie d’un groupe de soutien
pour toxicos et que vous lisez ceci, il est possible que vous ayez le sentiment
que ces mots dénigrent d’une certaine façon votre situation actuelle et vous
jugent cruellement d’en être à ce stade. Ce n’est pas le cas. Vous en êtes où
vous en êtes et la seule façon dont vous mobiliserez l’élan pour vous libérer
de la « mentalité de rétablissement (recouvrir) » est en regardant
votre situation à partir d’une perspective qui ne peut être offerte par aucun
groupe de soutien.
Si nous
n’intégrons pas notre situation actuelle, il est impossible de réaliser un
véritable mouvement vers un autre état d’être. Tout comme un toxicomane doit
admettre sa dépendance pour pouvoir bénéficier d’une aide, un membre d’un
groupe de soutien doit admettre qu’il est « en phase de
rétablissement » et ce que cela signifie vraiment, avant de passer à
l’état de ‘la découverte’.
Le
« rétablissement » est une paralysie émotionnelle. Rien ne change à
travers le rétablissement ; si nous sommes un « alcoolique en phase de
rétablissement » nous pouvons nous mettre à boire de grandes quantités de
café et à fumer cigarette sur cigarette ; si nous sommes un « accro à
l’héroïne en phase de rétablissement », nous allons compenser avec des
antalgiques. La dépendance aux groupes de soutien est tout simplement le
transfert d’une tendance addictive. On nous dit que « tant que nous nous
rendons à nos réunions de groupe de soutien, nous faisons des progrès ».
Pourtant, les seuls progrès que nous accomplissons lorsque nous faisons du
sur-place est de retarder le moment où l’épuisement entraîne la noyade.
Se rétablir
(re-covery), peu importe la manière dont nous le déguisons, c’est faire du
sur-place.
Découvrir
(dis-covery), c’est choisir de plonger dans les profondeurs des eaux et de
faire face aux profondes ténèbres de nos émotions refoulées.
Les réunions de
groupes de soutien sont un bon moyen de transition, non pas une destination.
Nous faisons tous ce type d’expérience à un moment donné de notre parcours.
Cependant, dès que la mentalité de groupe devient ‘une destination’, cela nous
enferme dans un désespoir tranquille. Notre tâche – si nous cherchons une
véritable libération — si nous cherchons à découvrir– est de pouvoir ressentir
le véritable état de notre cœur et, à travers le processus des
« ressentis », transformer la signature émotionnelle inconfortable
qui perpétue notre addiction ou dépendance. Personne ne peut faire cela pour
nous. Toute dépendance est entraînée par une signature émotionnelle douloureuse
et la libération d’une telle condition exige de faire face à notre propre
souffrance.
Notre
souffrance est notre libération.
Si nous ne nous
tournons pas vers l’intérieur pour faire face à cet aspect causal de notre
expérience, notre participation à tout groupe de soutien n’est qu’une
‘représentation’. Si le groupe dont nous faisons partie n’est pas motivé pour
nous libérer de lui-même, il devient notre héroïne ou notre alcool sous une
forme différente. C’est notre tragédie sous un autre visage.
Si nous sommes
actuellement dans une telle situation cela ne sert à rien que nous tentions
d’en échapper parce qu’alors inconsciemment et systématiquement nous allons
courir embrasser une autre expérience de groupe sédatif et dominant. Il est
préférable que nous prenions le temps de nous poser consciemment l’expérience
de groupe que nous sommes en train de vivre en l’observant clairement pour ce
qu’elle est.
Amener toute
expérience à la conscience permet de la transformer.
Lorsque nous
observons ces groupes pour ce qu’ils sont, il ne sert à rien, ni pour nous, ni
pour le groupe, d’essayer de se retourner de manière réactive contre lui ou de
tenter de réveiller les autres de leur situation hypnotique. Faites toujours
preuve de compassion, de douceur et de responsabilité. Il nous faut rester en
phase avec le principe alchimique authentique tel qu’il est enseigné dans Le
Processus de La Présence :
« Se faire
à soi-même ce que nous voudrions que les autres nous fassent ».
Rappelez-vous
qu’un groupe de soutien est un radeau de survie pour toute personne qui n’est
pas encore assez mûre pour grandir émotionnellement. Cette approche
compatissante, douce et responsable s’applique également à nous-mêmes si nous
faisons partie d’un groupe « spirituel » et que nous prenons conscience
« qu’aucune discussion ne saurait jamais se substituer à l’expérience
personnelle ». Discuter de manière intensive de spiritualité peut
également entraîner une forte accoutumance et rendre la pratique spirituelle
impuissante. Une fois que nous nous éveillons et réalisons les limitations
inhérentes à l’activité de groupe, notre tâche consiste à nous retirer du
groupe avec douceur et délicatesse, sans débat ou discussion.
Rappelez-vous,
il ne s’agit pas du groupe ; il s’agit d’enrichir notre voyage continuel
au-delà du cadre de ses limitations. Lorsque nous choisissons de mûrir
émotionnellement, arrivés à un certain point, nous devons passer à travers et
au-delà du besoin d’un accord, d’un soutien et d’une reconnaissance extérieurs.
Agir avec délicatesse implique d’agir avec gratitude.
Lorsqu’une une
chenille est prête à s’éveiller à la vie dans l’authenticité, l’intégrité et
l’intimité, la dépendance à la mentalité-de-groupe doit muer comme une vieille
peau. La chenille doit alors se protéger de l’extérieur dans son cocon afin
qu’elle puisse ressentir la plénitude à l’intérieur. A ce moment du voyage, la
solitude est l’épice qui apporte les saveurs à la nourriture nécessaire pour
une croissance continue. Nous devons être capables de ressentir notre peur, notre
colère et notre chagrin tout en demeurant au milieu de ces circonstances
énergétiques sans aucun renfort extérieur.
Aucun groupe –
quel que soit le niveau de conscience que ses membres semblent avoir
extérieurement et combien le leader peut nous paraître évolué – ne peut être un
substitut à ce moment de notre évolution. Le papillon naît toujours seul,
créant son passage avec courage et par ses propres efforts à travers
l’enfermement qu’il a lui-même créé. Le groupe n’a pas d’ailes. Il ne peut
voler. Par conséquent, toute promesse qu’il peut nous faire en vue de notre
élévation est toujours une illusion. Il peut nous retenir pendant que nous
sommes faibles, mais si nous devenons dépendants de cela nous nous
affaiblissons davantage.
Donc, la
réponse à ceux qui demandent s’ils peuvent créer un Groupe autour du Processus
de La Présence est par conséquent « Non ». Bien sûr, nous ne pouvons
éviter que de tels regroupements se mettent en place ; ceux qui sont encore
dépendants de la mentalité-de-groupe imposeront leur volonté à tous ceux qui
croiseront leur chemin. Ils défendront également farouchement leur
‘mentalité-de-groupe-chenille’ face à tout ‘discours-libérateur-papillon’. Nous
devons leur en être reconnaissants car ils permettent aux groupes de servir de
radeaux de survie pour ceux qui sont en train de se noyer.
Le dessein du
Processus de La Présence est un paradoxe en ce sens qu’il nous libère de notre
dépendance à la mentalité-de-groupe tout en nous encourageant à consciemment
reconnaître, embrasser et nous engager dans notre groupe de manière
authentique. Il nous invite à « œuvrer à notre propre libération en
travaillant au sein du groupe dans lequel nous nous trouvons à tout
moment ».
Notre famille
de naissance est notre groupe.
Notre compagnon
et amant est notre groupe.
Nos enfants
sont notre groupe.
Nos animaux de
compagnie et nos plantes sont notre groupe.
Le caissier du
magasin fait partie de notre groupe.
Nos
collaborateurs professionnels et nos clients sont notre groupe.
Tout être
humain avec lequel nous communiquons quotidiennement fait partie de notre
véritable groupe.
Sommes-nous
capables d’être en union avec tous ces êtres humains?
Sommes-nous
capables de rester dans le silence intérieur et la tranquillité lorsque nous
les rencontrons ?
Sommes-nous
assez courageux pour gérer l’inconfort émotionnel déclenché lorsque nous les
laissons entrer dans notre espace-temps personnel ?
Pouvons-nous
les intégrer dans nos vies aussi pleinement que possible en reconnaissant la
valeur de leurs contributions dans notre voyage éternel ?
Ou ne
pouvons-nous vraiment interagir aisément qu’avec des personnes qui fonctionnent
dans des situations soigneusement fabriquées, contrôlées et sédatives ?
Sommes-nous
uniquement intéressés à œuvrer à notre libération avec des personnes ayant les
mêmes idées que nous, avec celles qui sont généralement d’accord avec nous et
avec celles qui se rassemblent uniquement dans ce but précis?
L’authenticité,
l’intégrité et l’intimité nous demandent davantage que de simplement grandir à
travers une telle complaisance orchestrée.
La réalité est
que nous sommes et avons toujours fait partie d’un groupe, celui qui fait
partie de notre expérience quotidienne. C’est là que le véritable travail
s’accomplit. C’est là que nous recueillons les précieux trésors de la Présence.
C’est là que notre vie est confrontée aux possibilités infinies de pouvoir
approfondir notre expérience personnelle authentique, intègre et intime, avec
tout ce qui existe. C’est pourquoi nous n’avons pas besoin de former « un autre
groupe », nous sommes sans cesse au sein de notre véritable groupe. Nous
n’avons pas non plus besoin d’aller faire une quelconque retraite. Comment
« une retraite » pourrait-elle nous aider à avancer ? Le calme et le
silence nous suivent partout telle une ombre intérieure. Le calme et le silence
sont l’essence de ce que nous sommes et ne sont pas déterminés par l’endroit où
nous nous trouvons ou par les personnes que nous côtoyons.
Ce n’est que
lorsque nous nous tenons aussi consciemment que possible dans le centre du
groupe dans lequel la vie nous a placé et que nous faisons courageusement face
à l’ampleur de chaque instant avec un cœur disposé à tout ressentir, que nous
entrons dans une expérience de vie authentique. Cette approche est notre véritable
plate-forme d’envol.
Notre vie quotidienne est l’expérience intentionnellement
destinée à nous permettre de déployer nos merveilleuses ailes de papillon.
Former un groupe pour essayer de reproduire ce qui nous attend déjà au sein de
notre expérience quotidienne, c’est comme mettre en scène une pièce de théâtre
; cela peut être profondément amusant, audacieux, plein d’esprit et spirituel
voire très provocateur, mais il n’y a rien de vrai dans tout cela. Rien, de
toute façon, qui vaille la peine qu’on en parle.
En conclusion…
Je ne
recommande ni ne soutiens la création de « Groupes autour du Processus de
La Présence », nulle part, ni par qui que ce soit, ni pour aucune raison.
D’après mon expérience, les individus désireux de former un groupe autour du Processus
de La Présence rassemblent inconsciemment d’autres personnes comme moyen
d’éviter subtilement de faire face à leur état émotionnel non intégré en le
projetant sur le monde extérieur. Les ‘Groupes’ sont l’une de nos plus grandes
dépendances et sont également source de nombreuses formes déguisées et
involontaires de ségrégation sur cette planète.
Historiquement, les groupes se
percevant eux-mêmes comme étant « spirituels » sont susceptibles
d’être subtilement arrogants, ce qui immanquablement, enflamme une
mentalité-religieuse et mène systématiquement au conflit.
La nature du
nettoyage du corps émotionnel et le fait de s’éveiller consciemment à celui-ci
permettent finalement un ajustement entraînant une transformation intérieure
authentique qui n’est possible que lorsque initiée par soi-même et pour
soi-même. Dans Le Processus de La Présence nous ‘faisons à nous-mêmes ce que
nous voudrions que les autres nous fassent’.
Lorsque nous
nous en remettons illusoirement à ‘un groupe’ comme moyen d’accomplir cet
ajustement interne, nous agissons ainsi parce que cela correspond toujours
précisément à la partie en nous qui rencontre des difficultés pour grandir de
façon authentique et durable.
Je n’ai aucun
problème avec les « groupes » en soi car ils sont nécessaires au vu
de divers paramètres de l’expérience humaine. Ils sont par exemple un très bon
moyen de pouvoir appréhender la nécessité d’une croissance émotionnelle.
Cependant, ils ne sont pas utiles dans le voyage expérimental du Processus de
La Présence. Le Processus de La Présence est « un outil autonome
d’auto-facilitation ». Pour cette raison il ne peut convenir à tout le
monde ; il ne peut correspondre qu’à ceux qui cherchent à grandir de manière
authentique et qui ont la capacité de réaliser une telle exploration
émotionnelle sans recours à un soutien extérieur. Le Processus de La Présence
convient à ceux qui cherchent véritablement à s’appuyer sur la force de leur
propre cœur plutôt que de trouver un autre moyen déguisé de s’appuyer sur le
monde extérieur.
J’ai conscience
que des personnes ont formé des groupes autour du Processus de La Présence dans
différentes parties du monde. Je ne vais pas suggérer de manière réactive de
les supprimer. Ceux qui les ont formés ainsi que ceux qui en sont devenus membres
ont de manière évidente quelque chose d’important à réaliser à partir de cette
expérience.
L’une des leçons s’avèrera être la suivante : En raison de
l’authenticité du travail pouvant être réalisé avec le Processus de la
Présence, tous les groupes formés autour de ce processus d’expérimentation
seront inévitablement démantelés par l’éveil de la guidance intérieure de
personnes qui en font partie : la guidance intérieure ne nécessitant aucun
système de soutien externe pour valider l’authenticité de leur expérience. Une
fois que l’éveil d’un individu se produit véritablement, automatiquement la
structure du groupe se révèle elle-même comme étant une coquille vide ne
supportant que les programmes externes conduits par l’ego.
Michael Brown ©
Vu sur http://www.urantia-gaia.info