mercredi 9 octobre 2019

« D’une perspective à l’autre »






5 10  Tout est en soi. Dans ce monde de contraste, depuis la perspective duelle et humaine à celle beaucoup plus large qui ne juge pas mais se contente d’observer en silence, nous oscillons constamment entre ces deux visions. Enfin à chaque fois qu'une émotion se manifeste et trouble la paix intérieure.
Observer sans attente, juste en spectateur, sans rejeter, sans étiqueter, simplement en faisant un léger pas de côté, nous ouvre le cœur, l'esprit, l’horizon et les perspectives. 

Pas besoin de prier ou de s’imaginer que quelque chose d’extérieur viendra nous sauver parce que le but n’est pas de perdurer à tout prix mais plutôt d’expérimenter la matière, le mouvement, les mouvements dans le corps et d'apprendre à les accompagner. 
Apprendre à voir au-delà de la forme, des apparences et constater que nous contemplons à l’extérieur tout ce que nous sommes à l’intérieur, de la dimension qui semble la plus dense à celle la plus expansée, peut être difficile à vivre pour le mental conditionné.
Ainsi en tant qu’humain, nous pouvons tout autant percevoir la vie depuis le rôle, le personnage qui se croit limité, que depuis l’espace serein et silencieux de la conscience qui habite toute chose.

Il suffit de très peu pour que notre perception bascule en une fraction de seconde d’une perspective à l’autre. Il suffit de fermer les yeux et de se détendre, d’abandonner les pourquoi, les comment, de sortir du mental, pour que notre vision s’éclaire et s’élargisse. Le même évènement sera perçu totalement différemment si on se donne le temps de lâcher les jugements, les interprétations. 
Dans le silence de l’observation, des évidences apparaissent et les questions n’ont plus de raison d’être.


Une question est toujours l’expression de la peur que le mental essaie de "gérer", de contrôler, selon de vieilles stratégies qui n’ont jamais fonctionné mais qui ont crée des accumulations énergétiques et une façon de réagir qui nous maintiennent dans autant d’illusions, de croyances et de questionnements anxiogènes. 
On croit saisir la réponse mais on reste enfermé dans une spirale infernale qui est une succession de questions/réponses qui donnent la sensation de tourner en rond.
Très souvent on va sentir un écart immense entre deux formes de réalités qui semblent très éloignées mais quand on lâche les attentes, les interprétations, quand les questions restent ouvertes, on ressent que ces deux réalités s’interpénètrent et ne sont jamais séparées.

La matière est énergie, l’énergie est mouvement, ces deux plans sont intimement liés et c’est quand on tente de bloquer l’émotion qu’on à l’impression d’une césure, d’une séparation, d’une enferment dans la chair. 
En prenant l’habitude d’observer l’émotion en la laissant se mouvoir,  on sent qu’elle se transforme, et que ce qu’on appelait "peur" ressemble étrangement à un feu intérieur très proche du désir. On comprend que c’est seulement notre façon d’interpréter et le fait de le faire qui bloque le mouvement. Et c’est ce blocage qui nous fait souffrir, qui nous maintient dans le plan mental avec cette sensation d’être enfermé dans notre tête, dans notre corps, dans une condition humaine difficile. 

On n’est en fait simplement prisonnier de nos idées, de notre façon d’interpréter, de notre représentation de nous-mêmes et du monde qui se limite à quelques croyances, à quelques préjugés. Alors on incrimine le mental qu’on qualifie d’ego, on lui reproche de trop se poser de questions, d’avoir une vision étriquée, de rejouer sans arrêt les mêmes scenarii. On s’en veut de tomber dans le piège de l’identification, on lutte contre soi-même, on appelle au secours, on prie, on cherche une aide extérieure.

Et si on arrêtait de tourner en rond dans ce combat épuisant en s’adressant au mental dans son propre langage, en lui demandant pourquoi il se comporte de telle ou telle façon ?
Le mental est comme un enfant en quête de compréhension, en recherche de sens et quand on lui retourne ses propres interrogations, il se calme et confie ses plus grandes peurs. 
L’émotion peut alors surgir en même temps qu’il se sent écouté et aimé. 
Il n’attend même plus de réponse puisqu’en fait sa seule véritable demande, son seul besoin, c’est de se sentir aimé, accepté, reconnu, écouté et compris. 

Pourtant quand on est sensible aux énergies, quand on a vécu une ou plusieurs expériences qui ne laissent pas de doute quant à notre nature essentielle, quand on est sorti de son corps pour x raisons, on ne cesse de lutter contre ce mental qui nous dérange, nous empêche d’être au calme. On croit qu’on doit le faire taire, l’éduquer mais on ne fait qu’opposer le mental à lui-même. 
On qualifie de mental supérieur cet aspect qui juge, qui perçoit la vie selon la notion basique de bien et de mal mais c’est le mental formaté, obéissant aux lois de ce monde, obéissant à des parents, à la société, aux autorités autoproclamées. 

Chaque situation de stress, chaque peur m’invite à revenir à l’intérieur et à juste observer. Tant que j’essaie de comprendre, j’alimente la peur, le doute, je tente de contrôler l’émotion en vain, je limite ma perception et puise dans la mémoire, de vieilles stratégies, des réponses conventionnelles, habituelles ou même "spirituelles" qui ne font qu’amplifier le sentiment d’impuissance. 
Et pour cause, comment je pourrais trouver une solution nouvelle à ce que j’appelle un problème si je vais fouiller dans la mémoire, dans ce qui est connu et qui d’ailleurs me ramène inévitablement au même état, aux mêmes questions. 




Et si au lieu de ça, je me contentais d’observer ? Et si dans cette observation je reprenais conscience tout à coup, qu’il y a deux aspects en moi, un observateur et un observé ? 
Et si je choisissais consciemment la perspective de l’observateur ? 
Notre libre arbitre se situe là et notre perspective s’ouvre considérablement en l’espace d’un instant. On fait l’expérience de la magie de l’être, de la beauté du vivant, du voyage dans l’espace et le temps.

Pour illustrer cela, et parce que c’est pour moi l’occasion de vivre ce changement de perspective, je partage avec vous mon expérience du moment. J’ai un problème de vue depuis plus d’une semaine. Tant que je cherche des réponses au niveau physique à savoir quelle est la cause de ce trouble, je cultive la peur, la culpabilité, je reste confiné dans le mental puis si je suis une intuition qui parvient à s’exprimer dans toute cette confusion, je ferme simplement les yeux et je me détends.
Peu à peu, le calme s’installe, les questions disparaissent et j’écoute la peur que le mental exprime avec l’émotion associée. 

Je ne vois pas spécialement mieux quand j’ouvre à nouveau les yeux mais au moins je cesse de m’angoisser parce que je me souviens de la base essentielle : l’extérieur fait écho à ce qui se vit en moi, ce qui demande juste à être vu, accueilli, accepté ou lâché. 
L’idée même que le corps participe à cette invitation m’apparait presque comme une forme de complicité, une forme de bienveillance de sa part ; il n’est plus perçu comme un ennemi et c’est déjà beaucoup étant donné tout ce qu’il a dû subir. 

Je me souviens aussi du poison qu’est la culpabilité, cette culpabilité qui vient du projet insensé de donner au mental la responsabilité de gérer les mondes intérieurs, enfin les émotions/énergies.   
Puis je vois dans l’expérience de l’addiction, un moyen de constater dans ma chair, la folie de croire que le raisonnement mental peut gérer les pulsions, l’inconscient. 

Longtemps cela me faisait souffrir justement parce que la culpabilité m’envahissait mais dans l’observation dépourvue de jugement et par l’accueil des émotions, la perspective a totalement changé. Certes c’est un moyen radical, douloureux et vain de régler les "problèmes" mais en changeant de perspective cela devient l’occasion d’apprendre à lâcher prise, à sortir des conditionnements, du jugement, de façon concrète. Et donc à cultiver l’amour, la compassion, pour tous ces aspects internes contre lesquels le mental lutte tout en se sentant coupable d’avoir pris la "mauvaise" décision. Et en même temps presque simultanément, ma façon de voir les autres change complètement.

Souvent l’idée que la culpabilité est plus dangereuse pour le corps physique que le produit ingéré m’apparait comme évidente lorsque je lâche prise. Parce qu’un produit est aussi vecteur d’énergie, d’information et si la pensée de peur, de critique s’y ajoute, le message initial est brisé. 
Ce ne sont pas seulement les pensées à ce propos ou les jugements qui affectent mais le fait de faire d’un médicament sensé guérir, sensé porter un message positif, quelque chose de négatif au niveau vibratoire. Ce geste porte le poids de la culpabilité et tant que je lutte contre ça, j'entretiens à la fois la peur, la culpabilité, l'énergie du combat, du rejet de soi. 

Souvent, j’ai pu constater que l’idée de pouvoir prendre le produit faisait effet avant même que je l’ingère. Du point de vue purement humain, selon les stratégies basées sur les croyances et les conditionnements, l’addiction est perçue comme quelque chose de négatif et ce qui est nuisible à l’usager, c’est davantage l’idée qu’il se fait de lui-même que l’addiction en soi. 
L’intention, l’énergie qui porte le geste va amplifier l’effet dans le corps, dans le mental et le physique. 
L’usage de stupéfiant montre avec évidence comment l’état intérieur modifie la perception de soi-même, du monde et des autres. Lorsqu’on est bien dans son corps, on est bien avec les autres, on voit leur côté "humain", "lumineux", on voit la beauté du monde, on est généreux, ouvert…puis quand le produit ne fait plus effet, quand le manque apparait, c’est une vision diamétralement opposée qui s’impose à nous. La peur du manque prend toute la place et ça n’est pas uniquement une question d’hormones, c’est un ensemble de facteurs qui entrent en jeu. 

Le plus effectif, c’est l’état d’esprit, le regard dépréciatif qu’on porte sur soi, l’auto-jugement, l’enfermement dans le mental qui tourne en boucle dans les reproches, les jugements. L’inconscient et la mémoire traumatique sont activés par ces pensées négatives, les anciennes blessures sont ravivées mais on continue de vouloir les éloigner, de les nier, en leur donnant ainsi encore plus d’intensité, de corps. 
La solution n’est pas non plus dans la recherche de compréhension, la psychanalyse ou la régression qu’elle soit au stade fœtal ou dans des vies supposées antérieures, elle demeure dans l’accueil, au présent, de ce "matériau" énergétique, émotionnel. 

Dans cette approche, on va constater, ressentir et percevoir les mouvements internes autant ceux du mental et de ses questions, que celui de l’émotion qui par nature évolue. Puis ce qui était une intuition à peine audible devient une réalité, une évidence. 
Elle l’est pour soi-même et n’a pas besoin d’être confirmée par autrui. 

Ce qui avant me semblait une épreuve dans ce changement de perspective du pire au meilleur et vice et versa, ce mouvement chaotique, devient maintenant un potentiel énorme, une capacité à explorer les différents états de conscience, la variation de sensations nouvelles. L’espace s’élargit, les perspectives se multiplient, l’exploration commence ou continue mais en conscience, sans se sentir balloté ou manipulé.   




On ne se détache pas des blessures, du mental, des émotions en les bloquant, en les incriminant ou en les jugeant ni même en les comprenant intellectuellement, on le fait en apprenant à se positionner en observateur conscient et neutre. 
Peu à peu, par l’expérience, on s’identifie davantage à l’observateur qu’à ce qui est observé. On perçoit le mouvement intérieur quand on le laisse être, comme perpétuel en chacun des corps et cela donne une sensation de liberté, d’éternité ou d’illimité. 

Dès lors, on se fout de savoir si l’âme, si l’esprit, si l’enfer, le paradis, la réincarnation, la rédemption, on retient juste : « la vibration », le mouvement qu’on apprend à accompagner, à incarner et qui nous meut à chaque instant. 
On ne s’effraie pas non plus lorsque le mental se demande "comment accueillir", "comment changer la vibration" ou "comment être sur la bonne fréquence" puisqu’on comprend qu’il est normal qu’il panique et continue de vouloir contrôler. 
On sait que c’est par le fait de fermer les yeux, d’observer la respiration qui devient de plus en plus ventrale sans même chercher à la changer que tout s’équilibre à l’intérieur. Une fois la vague de trouble psycho-émotionnelle passée, on peut suivre l’élan de l’instant sans même se poser de question, sans chercher à savoir si c’est le bon ni où ça nous mène. Et si le doute s’installe, on demande au mental de se calmer de juste laisser la peur s’exprimer. Soit par le dialogue soit en fermant à nouveau les yeux.
  


Si vous souhaitez partager ce texte, merci d’en respecter l’intégralité, l’auteure et la source ; Lydia, du blog : « Journal de bord d’un humain divin comme tout le monde » ou http://lydiouze.blogspot.fr  Photos privées