Aujourd’hui de nombreuses
études scientifiques démontrent les bienfaits de la pleine conscience pour
prévenir les rechutes dépressives.
Des études ont montré des effets de la pratique de la méditation chez les moines bouddhistes sur le fonctionnement cérébral en augmentant l’activité des zones des émotions positives, et peuvent en partie expliquer pourquoi cette thérapie peut aider les personnes qui souffrent de dépression.
Des études ont montré des effets de la pratique de la méditation chez les moines bouddhistes sur le fonctionnement cérébral en augmentant l’activité des zones des émotions positives, et peuvent en partie expliquer pourquoi cette thérapie peut aider les personnes qui souffrent de dépression.
Dr Yasmine Lienard, psychiatre à Paris
Interview du
Docteur Yasmine Lienard (photo ci-dessous), psychiatre à Paris, spécialiste,
entre autre, de la thérapie cognitive basée sur la pleine conscience
(MBCT-Mindfulness Based Cognitive Thérapy-).
Comment peut-on
définir la pleine conscience ?
Le terme vient
de l’anglais « mindfulness ». Il s’agit d’un état d’esprit où l’on est
véritablement présent, où l’on observe tout ce qui est dans l’instant, sans
jugement de valeur et en acceptant tout ce qui se passe. Ainsi faisant, on se
met en rapport aux choses. Cela se travaille avec la méditation : la pleine
conscience peut durer une minute, mais bien plus longtemps si l’on s’aide de la
méditation
Par exemple,
peut-on se retrouver en pleine conscience sous la douche ?
Oui, tout à
fait. On peut être en pleine conscience à tout moment. C’est tout simplement
être là, présent à ce que l’on fait, aux sensations corporelles, aux sons et à
ce qui nous environne dans l’instant présent.
Les enfants
peuvent-ils être en état de pleine conscience ?
C’est vrai que
l’état de pleine conscience peut donner l’impression de retourner en enfance,
où l’on était très présent. On regardait un oiseau sans se demander s’il est
beau ou laid, on le regardait en s’émerveillant, un point c’est tout. Je ne
pense toutefois pas que les enfants soient continuellement en état de pleine
conscience, car ils ont du mal à se fixer dans le moment présent. La pleine
conscience est avant tout une démarche volontaire de porter son attention sur
les choses en dehors de l’esprit.
En quoi la
méditation peut développer cette aptitude de pleine conscience ?
Ce n’est pas
naturel d’être en pleine conscience. L’humain a très vite fait de poser des
hypothèses, réfléchir, raisonner, ce qui le coupe de la conscience de
l’instant. Se maintenir en pleine conscience est un entrainement de l’esprit. Dans
ce sens, plus l’on pratique la pleine conscience à travers la méditation, plus
on peut être présent en dehors de la méditation.
A qui cela
profite-t-il et quel bénéfice peut-on tirer de la pleine conscience ?
Le bénéfice est
général, tout le monde a intérêt à être plus présent. Aujourd’hui, on a
tendance à être beaucoup ailleurs et à avoir du mal à être en rapport aux
choses mais aussi aux autres. La pleine conscience permet donc d’être plus
présent et ouvert à ce qui est véritablement plutôt que dans les illusions de
son esprit. Par exemple, lorsque l’on est face à un tableau, on se met en
rapport avec l’expérience que l’on est en train de vivre à l’instant, comme les
vibrations ressenties par les couleurs que l’on voit, plutôt que de le juger ou
de lui mettre une étiquette de beau ou de laid. La pleine conscience est donc
une façon de sortir de la représentation conceptuelle qu’on a souvent des
choses et de les voir vraiment.
Y a-t-il un
rapport avec la spiritualité ou les énergies extérieures ?
Pas du tout !
La pleine conscience n’est pas de l’ésotérisme, c’est au contraire très
élémentaire. Il s’agit d’être attentif à ce qui se passe au moment où ça se
passe. Rien ne vient de l’extérieur comme quelque chose de fabriqué. On ne fait
que s’ouvrir à la réalité et non à créer un état de transe. Par contre vous
parlez de spiritualité. On fourre tout dans ce terme, mais le spirituel est ce
qui est en rapport à l’esprit, donc en ce sens pratiquer la méditation de
pleine conscience a à voir avec un travail sur son esprit. Mais il n’y a aucune
croyance à la quelle on s’accroche, c’est bien le contraire : on se détache de
toutes ses croyances.
Comment aborder
la pleine conscience la première fois ?
Il peut être
utile de l’aborder avec des livres et des stages, mais ça dépend de notre but.
D’une manière générale, mieux vaut être guidé, car au début, seul, c’est
difficile. La pleine conscience est une voie développée dans certaines méthodes
thérapeutiques de la dépression, car les dépressifs ont du mal à être dans le
temps présent. Dans ce cas, le travail est très encadré et il est recommandé de
le faire avec un professionnel de la maladie mentale car il y a un protocole
strict à respecter. Mais on peut s’entraîner à la pleine conscience dans des
stages de MBSR (Mindfulness Based Stress Reduction Program) axé sur la gestion
du stress ou alors dans un centre de méditation vipassana si c’est plutôt dans
une optique de développement personnel ou de mieux être.
Vous parlez de
thérapie, que soigne-t-on avec la pleine conscience ?
D’une manière
générale, la pleine conscience peut être utile pour tous types de troubles
anxieux ou dépressifs, ce que l’on appelle les névroses. Il peut être utile
d’apprendre aux gens à être plus dans la réalité.
Elle est utilisée pour les troubles graves de la personnalité ou les problèmes d’addiction. Pour la schizophrénie, il existe une thérapie basée sur la pleine conscience qui a montré une diminution des hospitalisations mais encore une fois, cela doit être fait avec un professionnel et dans le cadre d’un protocole. Méditer n’est pas la panacée à toutes les maladies mentales !
Elle est utilisée pour les troubles graves de la personnalité ou les problèmes d’addiction. Pour la schizophrénie, il existe une thérapie basée sur la pleine conscience qui a montré une diminution des hospitalisations mais encore une fois, cela doit être fait avec un professionnel et dans le cadre d’un protocole. Méditer n’est pas la panacée à toutes les maladies mentales !
Comment se
développe la pleine conscience en France ?
Par rapport aux
États-Unis, nous sommes très en retard. La pleine conscience peine à se
développer en France, car nous sommes très, très, très stressés, mais aussi car
nous sommes beaucoup plus cartésiens. Les Français sont imprégnés de l’esprit
rationnel et scientifique et ont donc du mal à penser de manière plus nuancée.
Nous avons également extrêmement peur des dérives sectaires.
Qu’aurait pensé Freud de la pleine conscience ?
Il aurait fallu
que je puisse discuter avec lui ! Il y a aujourd’hui des psychanalystes qui
sont beaucoup dans le « laisser parler ». Le patient s’installe et parle. La
pleine conscience, c’est exactement l’inverse. On ne veut pas être dans
le mental, on veut apprendre à être dans son corps. Il y a tout de même des
points communs, à commencer par le fait que le « moi » est au centre du
travail. Il y donc un lien entre Freud et la pleine conscience, tout comme il y
en a entre Freud et le bouddhisme. Car la méditation est une voie de libération
de l’égo, de la représentation de soi qui nous enferme. On peut donc méditer en
faisant une analyse, cela peut bien se compléter, je pense.
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