lundi 31 mars 2014

"Transformer les oui à tout, en non constructifs" rédigé par Anne-Laure Gannac






Non : un mot difficile à prononcer pour beaucoup d’entre nous. Pourtant, à toujours tout accepter, le risque est grand de se laisser envahir par les autres. Au point d’en oublier ses propres désirs. 
Comment briser le cercle du « oui à tout » ? Le point en six questions.
Sollicité par un patron, un ami, un conjoint, qui n’a jamais dit oui ou peut-être, quand il pensait non ? Radicale, irréversible, signifiant l’opposition et le rejet, la syllabe est passée sous silence. Décryptage d’une censure qui, au-delà du souci de politesse, révèle un manque réel d’affirmation de soi.

Pourquoi faut-il savoir dire non ?
Parce que cela permet de trouver sa place parmi les autres et de faire en sorte qu’elle soit respectée. Nous avons tous en tête une idée de ce qui est acceptable pour nous, de ce qui ne l’est pas, mais il nous appartient de bien signifier ces frontières aux autres. Sinon, le risque est de se laisser envahir par le désir des autres, de se laisser détourner de ses propres objectifs au point de ne plus savoir qui l’on est ni ce que l’on veut.

Difficile de dire oui ?
Dire difficilement non revient-il aussi à dire difficilement oui ? Souvent, car dans les deux cas, il s’agit d’un manque d’affirmation de soi. Celui qui ne sait pas dire non ne pourra pas dire de vrais oui, puisqu’il n’a pas une idée claire de ce qu’il ne souhaite pas, donc, aussi, de ce qu’il souhaite. Pour d’autres, au contraire, il peut être facile de refuser, mais pas d’acquiescer.
Car sur le terrain de l’affirmation de soi, le oui ajoute au non la notion d’engagement. Je dis oui dans le but d’échanger ou de collaborer davantage avec l’autre. Or, on peut tout à fait savoir ce que l’on veut et ce que l’on ne veut pas, tout en craignant de s’en ouvrir aux autres.

Peur du conflit ?
La difficulté à dire non est-elle forcément significative d’une peur du conflit ? C’est la première raison évoquée. Mais cette peur peut elle-même en cacher d’autres : la peur de l’autorité qui se manifestera, par exemple, dans l’incapacité à dire non à son patron.
Ou, dans le cadre de la relation de couple, la peur de déplaire et de perdre l’amour de l’autre : soucieux de lui faire plaisir, on finit par donner la priorité à ses seuls désirs, au point qu’ils deviennent un parasitage nous empêchant d’écouter les nôtres.
Enfin, la capacité à dire non dépend aussi de la capacité à accéder à l’agressivité, au sens positif du terme : colère, opposition, revendication… Ceci est d’autant plus évident chez les femmes. Par tradition, leur éducation est fondée sur cet à priori selon lequel « une femme ne doit pas se montrer en colère ». Du coup, elles refoulent leur potentiel d’agressivité, devenant incapables de le gérer. C’est ce qui explique qu’elles souffrent davantage que les hommes d’un manque d’affirmation de soi.

Le même non partout ?
Cette difficulté à dire non est-elle la même dans tous les domaines – professionnel, amical, conjugal ?
Tout dépend des origines du problème. Par exemple, les personnes qui ont subi des maltraitances dans l’enfance ou à qui il a été signifié que, pour satisfaire les autres, il fallait toujours être dans l’acceptation, raisonnent selon l’idée que le non met en danger.
Elles sont incapables de mettre en marche leur « logiciel » du non, et ce, dans quelque domaine de la vie que ce soit. Au travail, sur le terrain sentimental ou amical, elles deviennent des proies faciles par excellence.
Mais le plus souvent, la difficulté à dire non apparaît dans un domaine bien particulier. Ainsi, beaucoup vont s’affirmer sans difficulté face à leur patron ou leur collègue, mais être tolérant à l’excès dans leur couple ou avec leurs parents. En fait, plus la relation qui nous lie à l’autre, est chargée d’affect, plus la difficulté à s’affirmer est grande.




Peut-on dépasser sa difficulté à dire non ?
Plus les comportements sont ancrés en nous, plus il devient difficile de revenir en arrière car en changer signifie alors remettre en cause ses choix du passé. Cependant, dès lors qu’il y a un véritable désir de changement et une prise de conscience du problème, il est toujours possible d’apprendre à s’affirmer, notamment grâce aux techniques de développement.

L’acquisition du non est-elle définitive ?
Savoir s’affirmer est une stratégie mentale : soit elle est acquise, soit elle ne l’est pas. Mais la communication entre les êtres incite à un repositionnement permanent : les frontières que l’on pose entre ce qui nous est acceptable et ce qui ne nous l’est pas sont mouvantes, parce que nos idées, nos humeurs ou nos engagements changent.
Il est normal qu’à 20 ans, nos convictions ne soient pas les mêmes qu’à 40, ou que les jours où nous sommes de bonne humeur, nous soyons plus tolérants…
A l’inverse, toute personne, même très affirmée, peut se sentir vulnérable et voir l’ensemble de ses convictions vaciller dans un contexte douloureux de conflit, de séparation ou de deuil par exemple. Il est donc important de se remettre fréquemment en question, et de se demander :
« Qu’est-ce que je veux vraiment
? »

En matière sexuelle, beaucoup de femmes préfèrent se forcer, accepter ce qu’elles n’aiment pas et simuler plutôt que de dire non à leur conjoint. Elles se justifient en évoquant leurs peurs : peur de vexer l’autre, de le décevoir et, au-delà, de le perdre.
Paradoxalement, ce risque est bien plus menaçant lorsqu’il y a simulation et mensonge que dans une relation fondée sur l’honnêteté. Car, selon les thérapeutes, dire oui quand on pense non, c’est perdre la maîtrise de son propre corps, donc aussi l’accès au plaisir.
La femme réduit ainsi ses chances de retrouver l’envie de dire oui. L’homme, lui, perd son désir, puisque son plaisir dépend avant tout de l’assurance qu’il a de procurer du plaisir.
La solution ? Dire non et s’expliquer : en disant à l’autre ce que l’on veut, ce que l’on aime, ou pas, on lui donne les moyens de connaître notre corps et nos envies. Le couple évolue ainsi vers une meilleure entente sexuelle, sans doute le remède le plus efficace contre l’envie de dire non.

Refuser : Ça se travaille !

Quelques clés pour vous aider à transformer les oui à tout en non constructifs :

- Définir ce qui est acceptable pour nous et ce qui ne l’est pas. La difficulté à dire non vient souvent du fait que l’on patauge dans le doute. Il faut donc connaître ses priorités, savoir ce pour quoi on se bat, ce que l’on veut protéger, afin de délimiter son territoire de pensées et d’actions.

- Apprendre à formuler ses exigences de façon positive. Dire : « Je ne veux pas cela » ou « Je ne tolère plus ceci », c’est être dans l’évitement, alors qu’il s’agit, au contraire, de définir son positionnement. La question à laquelle répondre n’est donc pas : « Qu’est-ce que je ne
veux pas ? », mais « Qu’est-ce que je veux
? »

- Considérer tous les bénéfices que l’on peut tirer à savoir dire non face à telle ou telle situation. La visualisation de ces intérêts est toujours encourageante.

- Estimer les risques que l’on croit prendre en disant non, pour découvrir qu’ils sont souvent bien moindres. Cette prise de recul permet de rationaliser ses peurs.

- Savoir distinguer les gens de leur comportement. Trop souvent, on pense que dire non à une proposition revient à dire non à la personne qui l’exprime. Et c’est la peur de vexer l’autre qui nous incite à taire le non.

- Enfin, avancer crescendo dans l’affirmation du non, c’est-à-dire commencer à le dire dans des situations qui nous paraissent sans enjeu pour, peu à peu, prendre de l’assurance et exprimer son opposition dans des situations plus anxiogènes.
Anne-Laure Gannac
Article réalisé avec les psychothérapeutes Sarah Famery, Dominique Fromm
et Catherine Petitcoll
in.
Vu sur « La pensée activée » 
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J'ai eu l'occasion de poser des limites tout à l'heure et j'ai senti que c'était juste et utile tant pour moi que pour l'autre. Je peux voir que la culpabilité n'était pas présente parce que je n'ai pas ressassé pendant des heures. 
La fermeté dans l'affirmation de ses choix est effectivement essentielle, l'autre ne tente alors pas d'argumenter ou de batailler. Il ne s'agit pas de domination ni de jeu de pouvoir mais d'être juste envers soi et en même temps envers l'autre puisque l’intention n'est pas de le changer mais de faire en sorte qu'il ne nous manipule pas. 
Il n'y avait pas d'énergie de victime, de plainte, mais simplement une explication claire, concise, sans agressivité, malgré le ton déterminé. 
Ce qui me permet de dire que je n'ai pas agit par peur, c'est l'absence d'émotion et le sentiment d'avoir fait la bonne chose au bon moment.