jeudi 15 août 2013

"Etre en relation ou être soi"par le Dr Véronique Baudoux




Voici un nouvel article du docteur Véronique Baudoux qui aborde le thème de la relation à soi et à l'autre. (Je précise son titre pour appuyer ses propos bien que je pense qu'il n'est pas nécessaire d'avoir des diplômes pour avoir ces connaissances.). 
C'est après avoir vu ses vidéos sur le masculin sacré que j'ai atterri sur son site qui contient des articles intéressants ainsi que des outils de guérison, offerts gracieusement, en devenant membre. 
Vous pouvez les trouver à cette adresse: "Blog Réussir son couple"




Être en relation ou être soi

La semaine dernière, dans l'article portant sur le célibat, nous avons souligné le fait que, dans certains cas, les personnes qui choisissent volontairement ce statut de manière prolongée voire définitive étaient souvent motivées par des expériences difficiles lors d’un couple précédent.
Les témoignages de ces personnes qui adorent leur célibat comportent souvent  des commentaires qui parlent d’une liberté retrouvée :
  • « Je peux faire ce que je veux, je n’ai plus de comptes à rendre à personne»
  • « Je suis bien plus heureux(se) seul(e)»
  • « J’étais dans une prison »
  • « La relation était trop destructrice »
  • « Dans mon couple, j’étais un peu le sauveur et je me suis perdu ».
Dans ces cas-là, le célibat semble être une manière de se protéger des effets destructeurs du couple et ces témoignages montrent le couple sous son jour le plus négatif : celui dans lequel la relation, plutôt que d’être la source d’épanouissement et d’envol qu’il devrait être, est devenu une cage, exigeant de se transformer au point de ne plus se reconnaître et éteignant la flamme vitale de ceux qui y sont enfermés.

Pourquoi le couple en arrive-t-il parfois à devenir cette sorte de prison de laquelle nous serions tellement heureux de nous échapper que notre peur la plus profonde serait d’y replonger ?

Pourquoi cela nous semble-t-il parfois si difficile de préserver cette liberté indispensable dont nous avons besoin pour évoluer vers le meilleur de nous-mêmes tout en vivant une relation de couple épanouissante ?

Comment en arrivons-nous parfois à nous oublier totalement par amour pour l’autre ?
Faut-il absolument choisir entre «Être en relation» OU «Être soi» ?
N’est-il pas possible d’avoir les deux ? Est-ce vraiment incompatible ?
 Car si le célibat nous permet d’avoir une totale liberté de faire et d’être exactement ce que nous souhaitons, le couple offre aussi de magnifiques occasions de nous transformer et de grandir.

Alors, comment trouver le juste équilibre entre «Penser à l’autre» et «Penser à soi», entre «Accepter de changer» et «Rester soi-même» ?
Car, entre «Fusion Totale» et «Indépendance Totale», nous pouvons imaginer une voie du milieu, un troisième terme que  j’aurais envie d’appeler « Autonomie Solidaire »…
Mais comment pouvez-vous créer ce troisième terme ?

Quelles sont les croyances dont il faut vous libérer, les habitudes relationnelles qu’il faut transformer ou les blessures qu’il vous faut guérir ?
Je vous propose de vous livrer les 5 clés essentielles qui vous permettront de cheminer sur cette voie du milieu et de pouvoir ainsi ne pas devoir choisir entre rester vous-même et rester en relation et de pouvoir avoir les deux (parce que, je l’avoue, moi j’aime bien quand je ne dois pas choisir et que je peux tout avoir )
Mais comme chaque clé demande à être bien expliquée, j’ai décidé de scinder cet article en 5 épisodes dont je vous laisse découvrir le premier…

Clé n° 1 : Sortez du triangle Victime – Sauveur – Bourreau



Ce triangle relationnel est connu sous le nom de «Triangle de Karpman» du nom du Psychologue américain (spécialisé en analyse transactionnelle) qui l’a décrit dans les années soixante.
Cette manière d’interagir avec les autres peut exister dans toutes les relations : professionnelles, amicales, familiales… Mais c’est dans la relation de couple que ces interactions sont les plus exacerbées car, plus l’enjeu affectif est grand, plus nous avons tendance à nous appuyer sur des modèles qui ont fait leurs preuves dans les générations précédentes et dont nous avons souvent été témoins dans nos propres familles.

Ce qu’il faut savoir, c’est que, bien qu’ayant souvent un rôle dominant, nous pouvons passer de l’un à l’autre, parfois très rapidement… Aucun de ces rôles n’est pire ou meilleur qu’un autre mais TOUS sont  de sérieux obstacles à une relation épanouissante de type gagnant-gagnant (win-win). Car, dans ce triangle, tout repose sur le besoin d’avoir le pouvoir qui provient de nos peurs et de notre manque de confiance en nous.

Dans de nombreuses relations de couple (et pas uniquement dans celles qui sont pathologiques*), il est très fréquent que l’on rentre dans une interaction basée sur le fait de combler les manques de l’autre.
L’autre souffre de blessures du passé mais moi, je vais l’aider à en guérir et je vais lui apporter enfin tout l’amour qu’il ou elle n’a jamais reçu.
L’autre est triste, inquiet, malheureux, mais moi, je vais lui trouver des solutions pour qu’il puisse redevenir joyeux, confiant et heureux.
L’autre a des manques et des besoins et moi, je vais les combler.
La détresse (réelle ou supposée) de l’autre provoque chez nous un malaise qui nous pousse à vouloir intervenir dans sa vie et parfois même si on ne nous a rien demandé.
Nous donnons donc à l’autre le rôle de la Victime** et nous prenons le rôle du Sauveur.

Prendre le rôle du Sauveur est un réflexe inconscient qui provient de notre empathie naturelle mais aussi de notre fausse croyance que l’amour que nous pouvons susciter dépend de ce que nous faisons pour l’autre.
De plus, être indispensable au bonheur de l’autre peut nourrir notre estime de nous-mêmes et réussir à l’aider démontre notre propre compétence. Mais, en même temps, c’est relativement infantilisant pour l’autre puisque cela présuppose qu’il ou elle n’est pas suffisamment épanoui(e) pour être heureux(se) sans nous ni suffisamment fort(e) pour trouver ses propres solutions.
Mais si un jour l’autre, lassé d’être ainsi infantilisé, refuse notre aide (de manière ponctuelle ou définitive), nous risquons bien d’être déçu de ce que nous ressentons comme un total manque de reconnaissance et de tomber alors dans le rôle de la Victime qui culpabilise l’autre (« Je t’ai tant donné et tu m’abandonnes…!) ou dans celui du Bourreau qui insulte l’autre (« Après tout ce que j’ai fait pour toi, tu es vraiment  un monstre…!)

Inversement, en considérant que nous avons besoin de l’autre pour réparer nos blessures et combler nos manques, nous prenons le rôle relationnel de Victime et nous plaçons l’autre dans le rôle du Sauveur. Se sentir indispensable à notre bonheur est peut-être valorisant pour l’autre mais, en même temps, cela lui fait endosser une responsabilité qui n’est pas la sienne et qui est fort lourde à porter. D’autant plus que l’autre va se sentir notre Bourreau s’il ne parvient pas à répondre à nos besoins.
C’est parce que ces interactions sont destructrices pour les deux partenaires et qu’elles aboutissent toujours à transformer le couple en un lieu où on s’éteint plutôt que d’être source d’envol qu’il est essentiel de les dépister.

Pour reconnaître les situations qui nous font mettre les doigts dans l’engrenage de ce triangle, il est très intéressant de connaître les caractéristiques suivantes :
Les interactions du triangle sont toujours :
- Initiée par une attitude de Sauveur, de Victime ou de Bourreau.
- Inconscientes : nous avons l’impression de ne pas pouvoir faire autrement.
- Répétitives : elles nous donnent l’envie de dire « C’est toujours la même chose ».
- Dont nous attribuons la responsabilité à l’autre : « Si il/elle n’avait pas agi comme ceci, je n’aurais pas réagi comme cela ».
- Confuses et ambigües: elles nous donnent envie de dire : « C’est compliqué »
- Caractérisées par des changements de position dans le triangle de la part des deux partenaires ce qui permet de continuer le jeu.
- Et elles se terminent toujours de manière négative par la dévalorisation de soi ou de l’autre : on éprouve la sensation désagréable de s’être fait avoir ou la joie malsaine d’avoir triomphé de l’autre.

Chacun de ces trois rôles est un résidu de l’enfant qui sommeille toujours en nous, prêt à se réveiller à la moindre blessure…
L’enfant qui a peur de ne pas s’en sortir tout seul et de ne pas avoir le soutien nécessaire, l’enfant qui a peur de ne pas être aimé et qui veut à tout prix plaire à papa/maman, l’enfant qui a peur de ne pas avoir sa place et qui la prend de force…
L’antidote à ce triangle dramatique : le triangle thérapeutique (aussi appelé « Triangle du plaisir » : j’avoue que j’ai un faible pour ce nom-là )

Comment construire le « Triangle du Plaisir » ?




En n’endossant pas la responsabilité du bonheur de l’autre (prendre soin n’est pas la même chose que prendre en charge) et en s’appuyant sur l’adulte qui est en nous pour développer les 3 P : Puissance – Permission – Protection

Puissance : correspond au sentiment de confiance en soi et en ses propres ressources, ses propres compétences. Il se base sur les expériences positives que nous avons faites et dans lesquelles nous avons connu des succès, des réussites.

Permission : nous donne la permission de grandir, d’évoluer, de faire autrement que ce que nous avons toujours fait, de faire des choses qui sont bonnes pour nous. Cette permission se fonde sur la confiance en notre capacité à nous adapter aux changements et à faire face à d’éventuelles difficultés. Elle nous ouvre de nouvelles perspectives.

Protection : établit les repères, le clair et sécurisant au sein duquel la relation peut rester positive pour les deux partenaires. La solidarité mutuelle respecte alors les limites de chacun et ne risque pas de dévier vers le sacrifice de l’un ou de l’autre.
L’objectif étant de se permettre de sortir du triangle en s’appuyant sur un des 3 P tout en permettant à l’autre de quitter le rôle Victime – Sauveur – Bourreau  en lui montrant la voie vers un de ses propres 3P.

Exemples :
L’autre (Victime) : « Je ne vais pas m’en sortir » 
La Puissance : « Quelles solutions ont-elles fonctionné la dernière fois que tu as été confronté(e) à ce genre de problématique ? »
La Protection : « Si tu m’expliques ce dont tu as besoin, je verrai si je peux t’aider. »
L’autre (Bourreau) : « Je te demande un conseil et tu ne m’aides pas. »
La Permission : « J’ai confiance en ta capacité de trouver de nouvelles solutions. »
La Protection : « Qu’attends-tu de moi ? »
L’autre (Sauveur) : « Je ne le fais pas pour moi mais pour toi car tu n’as pas les mêmes compétences que moi. »

La Puissance : « Je t’en remercie mais je pense que je vais pouvoir me débrouiller »
La Permission : « Pour une fois, je vais m’en occuper. Cela me permettra d’apprendre »
La Protection : « Si je ne m’en sors pas, je n’hésiterai pas à te demander de l’aide »

 Repérez vos rôles relationnels et ceux de l’autre, sans jugement, avec beaucoup d’indulgence pour votre enfant intérieur et celui de votre partenaire.
L’humour dans le décodage des interactions peut également être d’un grand secours (au départ, vous pouvez même fabriquer 3 chapeaux en papier avec les noms ou les dessins représentant les 3 rôles et n’hésitez pas à placer sur votre tête celui qui correspond au rôle que vous êtes en train de jouer).
Sachez qu’il est toujours plus facile de détecter un rôle chez l’autre que chez soi-même (et acceptez qu’éventuellement ce soit l’autre qui vous ouvre les yeux sur votre rôle favori). Si vous avez décidé ensemble de sortir du triangle, c’est pour le bien de votre relation. Souvenez-vous de cette intention positive si vous vous sentez blessé lorsque l’autre pose un chapeau sur votre tête.
Exercez-vous, soyez créatifs dans  vos manières d’utiliser vos 3P.
Retenez qu’il est toujours plus facile de ne pas entrer dans le triangle que d’en sortir.

Notes

*Dans les relations pathologiques comme la manipulation, c’est l’autre qui nous fait endosser de force ce rôle de sauveur puis rend impossible le fait d’être sauvé pour pouvoir nous reprocher d’être son bourreau. Et, en nous accablant de reproches et en suscitant notre culpabilité, il devient notre réel bourreau. Avec les manipulateurs/manipulatrices pathologiques, il est impossible de sortir du triangle de Karpman.
**Attention : il est important de distinguer le RÔLE relationnel de victime que l’on peut jouer  dans le triangle du STATUT de victime qui, lui, est bien réel et pour lequel la reconnaissance de ce statut  est primordiale (victime d’une agression, victime d’un viol, victime de manipulation…)

Article rédigé par Véronique Baudoux

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Je tiens à préciser que l'enfant qui reste en nous, dont elle parle dans l'article, n'est pas à bannir, il a aussi son rôle à jouer de façon positive. 
Il est vrai qu'il vaut mieux ne pas lui confier notre histoire d'amour, ça n'est pas du tout son rôle. Mais tant que nous n'allons pas à sa rencontre afin de libérer les anciennes croyances, il exprimera les émotions de façon excessive, par des explosions et nous agirons selon ces croyances passées. Mais lorsqu'on se tourne vers l'intérieur, dans l'accueil, il nous inspire la spontanéité, la joie de vivre, certaines émotions qui nous rendent plus légers...mais pour ça, il faut que ses blessures aient été guéries. Enfin, c'est mon intime conviction, validée par l'expérience... 
Lydia

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